Christianophobie ???

Il y a une « mode » en ce moment : une poignée de « chrétiens » plus ou moins intégristes défilent dans les rues de Paris ou de Toulouse pour réclamer l’interdiction de spectacles « blasphématoires » et se plaindre d’une « christianophobie » montante en France.

Leurs slogans, du type « La France est chrétienne et doit le rester » sont à la fois un non-sens et un abus de pouvoir. Non-sens : et pourquoi donc ? au nom de quoi, de qui, notre pays devrait-il rester « chrétien » ? La gaule eut ses druides, fallait-il alors conserver à jamais une religion celtique ? En quoi le christianisme serait-il plus précieux que les croyances qui l’ont précédé, et qui, sans doute, le suivront ? L’Eglise catholique a fait du mal - beaucoup - au cours de ses 2000 ans d’existence, et il est au contraire temps de tourner cette page, à mon avis ! Abus de pouvoir : comment un groupuscule intégriste peut-il une seconde imaginer dicter ce qui doit être et ce qui ne doit pas être ? Si c’est ça, je peux aussi balancer mon slogan : « La France a été religieuse, elle doit maintenant devenir athée » . Na !

L’église catholique de France s’est positionnée face à ces mouvements : Mgr Wintzer y a répondu plutôt sèchement : « Christianophobie, c’est brandi comme un slogan. Quand il n’y a plus de pensée, on trouve des mots chocs. » [1]. Et en effet, acquiesce : ce mot est brandi comme un slogan vide de sens.

Car ça veut dire quoi « christianophobie » ? J’imagine que ce mot est forgé sur « chrétien - phobie » , la haine du chrétien. L’utilisation de ce terme permet de surfer sur la vague des *phobies : homophobie, judéophobie, etc...

Mais là encore c’est un abus. Prendre position pour une déchristianisation de la France (du monde, en ce qui me concerne), ce n’est pas ressentir de la haine pour les chrétiens. J’estime que cette croyance relève de l’obscurantisme avec ses figures caricaturales (dieu, diable, anges, saints bla bla bla) et sa volonté de diriger nos vies (Paresse, Orgueil, Gourmandise, Luxure, Avarice, Colère, Envie, pas de préservatif mais l’abstinence, pas d’avortement, etc). C’est contre cette volonté de définir le bien et le mal et de nous imposer de respecter cette règle que je m’insurge, et non contre ceux qui croient à ces règles. Leurs croyances ne me gênent pas... du moment qu’ils me laissent libre.

A l’inverse, on peut bien parler de judéophobie ou d’homophobie : les juifs furent exterminés il n’y a pas si longtemps en raison de leur croyance. On s’en prenait aux personnes, et non à leur foi, ou à leurs règles. Je ne crois pas que la religion d’Abraham soit guère meilleure que celle de Jésus. Mais là encore, ceux qui veulent la suivre en sont libres à mon sens. De même les homos sont discriminé en raison de ce qu’ils sont, et n’ont toujours pas, aujourd’hui, le droit de vivre sur un pied d’égalité avec le reste de la population.

Les chrétiens ne sont pas victimes de ce type d’exaction. Ils ne sont pas non plus propriétaires de l’image de dieu ou de celle de Jésus. Ces icônes font partie d’un fond culturel commun, et si quelqu’un souhaite s’exprimer à leur sujet, que ce soit pour les promouvoir ou pour les tourner en dérision, c’est un droit fondamental et inaliénable. Comme le dit un article du Monde, la caricature des religions est un droit conquis de haute lutte au XIXè siècle. Au nom de quoi abandonnerions-nous cette liberté aujourd’hui ?

Le détournement du sens des mots ne fait pas un argument, ne fait pas raison. La christianophobie a sans doute existé au temps où les chrétiens étaient envoyés au Cirque, mais ce n’est plus le cas aujourd’hui.