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Public  Détournement réthorique

... Se mettre du côté des Gentils à n’importe quel prix

mercredi 22 mai 2013, lu 94 fois

Le "Printemps Français", la partie la plus "dure" de la "Manif pour tous", désigne les "partis de la collaboration". Oui, ils font bel et bien allusion à la collaboration avec le régime nazi : "L’histoire récente nous a montré les conséquences d’une loi qui prétendait fonder la société sur la supériorité d’une race, ou sur celle d’une classe. De ces deux cas, les pires totalitarismes sont sortis, provoquant la ruine de la civilisation. [...] La France, en particulier, sait dans quels bas-fonds elle est tombée sous le joug d’une idéologie, mais aussi à quelle libération elle est parvenue par sa résistance".

Évidemment, dans leur scénario, les "collabos" sont les partis qui ont voté le mariage pour tous ("des partis politiques annoncent déjà leur collaboration avec le pouvoir idéologique, en affirmant faussement que la loi Taubira ne pourra pas être abrogée. En se plaçant dans le camp ennemi, ils se désignent eux-mêmes comme des adversaires"). Et tout aussi évidemment, ils sont eux-mêmes les gentils résistants.

Outre la théâtralisation rhétorique (on assimile la loi sur le mariage à la Shoah, selon la bonne vieille loi de Godwin), cette argumentation (si l’on peut dire), amène quelques réflexions :

(1) Elle nie le processus démocratique. Eh oui, le principe de base de la résistance à l’oppresseur, c’est qu’il y ait un oppresseur !!!! Or, dans le cas qui nous intéresse, l’oppresseur désigné est le législateur (député, sénateur, conseiller constitutionnel) élu au suffrage universel, sur mandat explicite d’ouvrir le mariage et l’adoption à tous (engagement n°31 du programme de François Hollande). Autrement dit, l’oppresseur c’est celui qui applique le processus démocratique. Ce genre de débat, aussi vif soit-il, ne s’appelle pas la Résistance ou la collaboration, il s’appelle la Démocratie. Et le processus démocratique, tel qu’il existe en France, c’est l’élection au suffrage direct ou indirect du Parlement, qui vote les lois. Désigner comme "collabos" ceux qui ont voté le mariage pour tous, ou ceux qui pensent (et disent) qu’on ne pourra pas l’annuler, c’est tout simplement s’inscrire dans la négation du processus démocratique.

(2) Elle joue la confusion entre l’oppresseur et la victime. Vouloir "entrer en résistance" comme le propose ce groupe, c’est se placer de fait dans la (quête de) dictature par une minorité qui s’oppose à la majorité démocratique. C’est une inversion de la situation : celui qui cherche à imposer sa loi contre la majorité le fait au nom de la soi-disant agression qu’il subirait. Autant il me semble légitime que quelqu’un qui est opposé au mariage pour tous ne change pas d’avis une fois la loi votée (même s’il est alors tenu de l’appliquer), autant cette agression anti-démocratique qui voudrait faire passer les parlementaires pour des méchants qui veulent la destruction de notre société est une hérésie schizophrène (et paranoïaque ???).

(3) Elle prend racine dans les postures récentes des politiciens. Nos politiciens nous ont depuis longtemps habitués à une certaine mauvaise foi : quand un (ex-)ministre de gauche avoue des malversations fiscales, la droite hurle à l’incompétence judiciaire de la gauche ; mais quand ce sont les malversations d’un ex-président de la République qui font surface dans les enquêtes judiciaires, elle hurle à l’acharnement partisan. La droite pourtant veut qu’on recherche et poursuive les transgresseurs : elle devrait à la fois se réjouir qu’un ministre soit acculé aux aveux et à la démission, et qu’un ex-président fasse l’objet d’une mise en examen. La gauche ne fait pas mieux. Elle a largement montré qu’elle savait aussi tirer sur l’ambulance quand cela lui permet d’espérer gratter quelques points dans les sondages. Ces deux attitudes arrivistes sont totalement contre-productives. Les spectateurs de ces théâtres ridicules et pathétiques sont tout à fait conscient que la parole politique est opportuniste et que la vérité d’aujourd’hui contre l’adversaire deviendra erreur demain en faveur de son propre camp. Les politiciens se décrédibilisent dans ces prises de position outrancières et contribuent à l’affaiblissement démocratique et à l’émergence de groupe qui ne font finalement que pousser le bouchon un cran plus loin.

J’aimerais que les politiciens arrivent à s’exprimer en leur âme et conscience et non selon le vent du moment. Certes, une opinion peut évoluer, et même beaucoup, mais elle ne devrait pas changer d’une minute à l’autre selon l’intérêt électoral. Heureusement, tous les politiciens ne sont pas comme ça, et même si je me suis parfois opposé à eux, j’ai un immense respect pour certains. Simone Veil est l’exemple qui me vient le plus facilement en tête, mais je pourrai aussi mentionner Clémentine Autain, Pascal Canfin (avec un soupçon depuis qu’il est au gouvernement et que ses actions semblent moins cohérentes avec ses opinions), Christiane Taubira comme potentielle nouvelle venue (à voir...), Jean-Luc Roméro,...

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