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OGM et gaz/pétrole de schiste : même combat

La Terre et l’humanité ont besoin d’un autre chemin

jeudi 13 février 2014, par Eric

Je l’ai déjà exprimé, l’homme est un apprenti-sorcier qui ne tire des leçons que dans les catastrophes, et encore (Three Miles Island, Tchernobyl et Fukushima : EDF/Areva nous endort encore avec leur « le nucléaire français est SÛR » ).

Quelles leçons avons-nous donc raté ?

De tout temps, lorsqu’une communauté humaine s’est mise à dégrader son environnement, son histoire a mal tourné (je radote, mais je citerai volontiers les Vikings du Groenland, l’Île de Pâques, et quelques poignées d’Américains du Nord et du Sud [1]).

Regardons les OGM à l’aune de cette idée. Que proposent-ils ? De modifier le patrimoine génétique de plantes « utiles » (sous-entendu d’autres sont inutiles, ce qui est une idiotie), un patrimoine élaboré au cours de milliards d’années d’évolution pour être optimal dans un environnement donné. Que sont censées apporter ces modifications ? Une meilleure résistance aux « nuisibles » . Au moment où l’Europe se prend les pieds dans le tapis de ses règles de vote, pourquoi faut-il s’opposer aux cultures OGM ?

  1. Parce que les cultures OGM propose des modes de diffusion ou de résistance acquise à des pesticides : les plantes sont modifiées pour mieux supporter les herbicides / pesticides (sous-entendu : on peut alors en balancer trois fois plus sur les champs cultivés, seuls les « nuisibles » crèveront) ou pour produire elles-mêmes ces éléments (sous-entendu : elles deviennent toxiques et les « nuisibles » qui tenteront de les manger crèveront). Il est remarquable de voir comment cela parle d’une vision du monde : refusons de nous adapter au fonctionnement de notre environnement, la solution est de détruire tout ce qui nous dérange. Malheureusement, cela ne peut pas marcher :
    • les « nuisibles » crèvent : malheureusement, les « nuisibles » ont une place dans l’environnement et cette place a une raison... Les tuer, c’est briser les chaînes alimentaires, les équilibres écologiques et laisser la place à des envahisseurs imprévus ; de plus, nous ne savons pas faire des poisons qui ne ciblent que les
    • les « utiles » crèvent aussi : abeilles et compagnie, qui nous sont nécessaires, sont empoisonnées, fragilisées et disparaissent à grande vitesse
    • ces plantes arrosées de pesticides ou imprégnées de poisons qu’elles fabriquent les transportent jusque dans nos assiettes... A votre santé !
    • les gènes se dispersent dans la nature, les « nuisibles » deviennent à leur tour résistants... retour à la case départ
  2. Parce que les OGM sont une quête désespérée de maintenir un mode de production agricole qui fait faillite... La production intensive détruit les sols : il faut toujours plus d’engrais, plus de traitements, pour des résultats de moins en moins bons, aussi bien en termes de quantités produites, que de qualité gustative et sanitaire ; elle nécessite par ailleurs le regroupement des terres, qui conduit au lessivage et à la perte de la couche arable (estimation : la France perdrait 1,2 milliards de tonnes de terres agricoles par an... en 2030, l’UE n’aurait plus les moyens de nourrir sa population du fait de cette érosion accélérée)
  3. Parce que la nature a à la fois la capacité à s’adapter et l’incapacité à s’adapter aussi brutalement... Autrement dit, sur le court terme, nous risquons de déséquilibrer notre environnement et d’en subir les conséquences et sur le long terme, c’est un combat perdu d’avance : les « nuisibles » finiront par trouver une parade...

Bref, l’idée même des OGM pour favoriser la culture intensive est une voie sans issue. Ces manipulations peuvent avoir un sens, lorsqu’il s’agit de faire fabriquer par une plante un médicament (en la cultivant dans un lieu clos...) ou (mais je doute) de modifier une bactérie pour qu’elle puisse dépolluer un terrain (il faudra bien nettoyer l’environnement des séquelles de notre incompétence). Autrement dit, des cultures limitées, ponctuelles, ciblées.

Les gaz et pétrole de schiste relèvent du même problème.

Fracturer la « roche » pour lui faire cracher ses précieuses molécules carbonées, quelles conséquences ? La première technique, injecter de l’eau et des produits chimiques, était hautement polluante (nappes phréatiques...). Pas la peine de « tester » ici : on voit les conséquences aux USA. On nous parle aujourd’hui d’une technique plus propre (injection de gaz). Bon, on ne sait toujours pas ce que ces micro-fractures peuvent produire comme résultat à long terme (modifie-t-on la perméabilité des sols ? facilite-t-on le vidage des nappes phréatiques ? aucune idée). Mais même en imaginant que cette technique devienne un jour propre (ne laissant aucune pollution) et sans séquelle (le sol conserve ses propriétés mécaniques), cette technique n’est PAS intéressante.

Elle conduit à maintenir l’utilisation massive de « carburants » polluants, elle pallie la disparition du pétrole et du gaz, elle permet de retarder la transition énergétique. Oh, bien sûr, au passage, certains auront empoché des millions, ces mêmes certains qui militent pour la libre entreprise, le droit de forer et qui partiront ensuite en laissant les séquelles à gérer par la communauté (vous connaissez beaucoup d’entreprises qui ont géré les problèmes des nappes phréatiques qu’elles ont pollué, des mines qu’elles ont creusées, des résidus chimiques qu’elles ont balancé dans nos fleuves... Il n’y a qu’à voir les réactions quand on veut limiter les conséquences des camions ou du déversement d’engrais... parlons écotaxe ou interdiction de la pèche profonde et regardons l’humanité se mettre des œillères pour faire de l’argent maintenant plutôt que laisser un environnement viable à ses descendants).

Nous n’avons pas besoin de faire plus d’argent. Nous n’avons pas besoin de croissance économique décorrélée de croissance environnementale et sociétale. Se tourner vers les sirènes de la « libre » entreprise (entendez : celle qui se fout des conséquences de ses actes) ou de la flexibilisation du travail (entendez : le droit d’exploiter les gens pour s’en mettre plein la poche), c’est tourner le dos à l’avenir. C’est foncer dans le mur.

Mais c’est facile de critiquer. Que fait-on pour les retraites, pour la Sécu, comment financer la transition, comment financer le remplacement des voitures, comment diminuer la pression sur l’environnement, comment s’en sortir ?

Il n’y a pas de solution miracle. Chacune des actions nécessaires sera coûteuse et douloureuse. Nous aurons à devenir fourmis pour rattraper l’insouciance des cigales qui nous ont précédés ou que nous avons été. Mais plus nous attendrons et plus la note sera élevée. Les écolos nous alertent depuis 50 ans. Les scientifiques, peu à peu, les rejoignent et nous préviennent : la date approche où il sera trop tard. Les cycles écologiques et le climat se dérèglent. Certains ont crié victoire parce que les températures ont cessé de monter depuis 15 ans, mais il s’avère que ce n’est qu’un répit dû à un refroidissement cyclique mais temporaire et qui entraînerait un réchauffement accéléré lorsqu’il stoppera... dans quelques courtes années.

Et comme les cigales, si nous attendons trop, un jour viendra où... nous nous trouverons fort dépourvus et n’auront plus qu’à danser maintenant...


[1Je vous laisse lire Les limites de la croissance dans un monde fini

Messages

  • 3 raisons supplémentaires :

     depuis des années, les populations européennes s’opposent aux OGM. Tous les sondages, toutes les élections l’ont montré. Mais cela n’empêche en rien les lobbies de continuer à insister et à vouloir rentrer par la fenêtre quand on les chasse par la porte. Où est la liberté là -dedans ???
     aux USA, où les OGM sont autorisés, voire promus depuis longtemps, les populations aussi commencent à s’inquiéter et à refuser les OGM, mais...
    * il n’y a pas d’étiquetage (obligatoire) permettant de distinguer les produits avec des produits sans OGM, donc pas de possibilité d’être sûr d’éviter d’en consommer : au nom de la liberté d’entreprendre, on a écrasé la liberté de choix des consommateurs, et les lobbies s’opposent de toutes leurs forces à la mise en place d’un étiquetage : démocratie, où es-tu ? Coincée avec la liberté de choix dans les tiroirs-caisses des entreprises...
    * le retour en arrière est quasiment-impossible : les OGM ont dispersé leurs gènes dans la nature, et les entreprises interdisent (au nom des profits, au prétexte de l’emploi) toute mesure qui permettrait de changer de cap...

    Autrement dit, la préservation de notre liberté passe par le refus des OGM. Il en va de même de l’accord transatlantique, qui permettrait aux entreprises d’imposer leurs produits aux populations qui n’en voudraient pas, et qui interdiraient le boycott en évitant l’étiquetage. Vous me croyez pas ? Réfléchissez... Vous êtes capable de dire quels produits parmi ceux que vous achetez contiennent des molécules issues des nano-technologies ? Vous savez quels légumes sont irradiés parmi ceux que vous mangez ? Pourtant, les nano-techs sont largement diffusées (voir Le Monde et Reporterre) et l’irradiation est autorisée (et pratiquée, ne rêvons pas !) sur de nombreux produits agricoles (voir International News et Wikipedia)...

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